Surveiller le courant de la grippe aviaire par les eaux

Le sud-ouest de l’Ontario est un lieu de mouvement. Il s’agit du poste frontalier le plus fréquenté au Canada, tant par les humains que les oiseaux migrateurs : chaque année, des millions de personnes, de marchandises et d’oiseaux le traversent.
Il est donc logique que les groupes de recherche dirigés par trois scientifiques de l’Université de Windsor adoptent une approche multidisciplinaire pour surveiller la grippe aviaire, ou influenza aviaire. Dan Mennill est l’ornithologue du groupe, Mike McKay, l’expert en microbiologie des Grands Lacs, et Kenneth Ng étudie les changements dans les séquences génomiques des virus afin de surveiller leur évolution potentielle.
« Il s’agit de l’approche “Une seule santé”, explique le Dr Ng, chef de projet. Les infections chez les oiseaux peuvent occasionnellement entraîner des infections chez les mammifères, y compris les humains. Les scientifiques restent à l’affût des changements dans la grippe aviaire qui pourraient conduire à une pandémie. »
L’équipe surveille les eaux des lacs et des rivières, ainsi que les eaux usées, afin de suivre l’évolution génomique des virus de la grippe aviaire, autant dans les populations d’oiseaux sauvages que chez les animaux d’élevage. Le travail commence par l’échantillonnage des voies d’eau de Windsor-Essex et du long de la rive nord du lac Érié où les oiseaux aquatiques se rassemblent, « un goulot par lequel passent la plupart des oiseaux migrateurs du Canada », explique le Dr Mennill. L’équipe du Dr McKay examine ensuite ces échantillons, ainsi que des échantillons d’eaux usées de la région, pour y détecter la grippe aviaire.
Les échantillons positifs sont envoyés au laboratoire du Dr Ng, qui met au point des méthodes de détection des changements dans les séquences génomiques.
« Il s’agit d’une convergence passionnante entre les champs d’intérêt d’un ornithologue, d’un spécialiste de l’environnement et d’un biochimiste », déclare le Dr Mennill.
« Aucun d’entre nous ne pourrait tout faire individuellement, mais ensemble, nous apprenons les uns des autres et nous approfondissons et enrichissons le travail de chacun », ajoute le Dr Ng.

Il s’agit d’un travail stimulant, mais urgent. La propagation des infections des oiseaux sauvages aux volailles d’élevage commercial, aux bovins laitiers et aux humains donne aux virus la possibilité de s’implanter chez d’autres espèces. On craint fortement que les virus ne finissent par acquérir des mutations leur permettant de se transmettre efficacement entre les humains.
Le Michigan, juste à la frontière de Windsor, a connu une importante éclosion de grippe aviaire dans les troupeaux de bovins laitiers, ainsi que certains des premiers cas humains, et la présence de virus a été détectée dans les eaux usées de différents endroits dans l’État.
Cela dit, les nouvelles méthodes de surveillance élaborées par l’équipe commencent à porter leurs fruits. Des séquences génomiques de virus de la grippe aviaire ont été obtenues à partir d’échantillons d’eau prélevés dans des étangs et des lacs de la région frontalière de Windsor-Essex, validant ainsi la nouvelle méthode de séquençage des virus à l’aide d’échantillons environnementaux.
En bref
L'enjeu
La grippe aviaire a été détectée chez les volailles, les bovins laitiers et quelques humains, en plus des oiseaux sauvages. Il est donc essentiel de surveiller l’évolution d’agents pathogènes tels que la grippe aviaire afin d’avertir les organismes de santé des menaces émergentes avant qu’elles ne créent des problèmes de santé publique majeurs.
La recherche
Une équipe multidisciplinaire d’ornithologues, de spécialistes de l’environnement et de chercheurs en virologie moléculaire surveille les populations d’oiseaux sauvages et les eaux usées de la région de Windsor-Essex, le poste frontalier le plus achalandé au pays, afin de détecter des changements dans la grippe aviaire.
- Date de modification :